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Le rapport du secrétaire général de la CGT: L’espoir et l’ambition de jours meilleurs

Chers Camarades Permettez moi, pour débuter cette intervention, de souhaiter au nom de la direction confédérale, la bienvenue au 49ème Congrès de la CGT à l’ensemble des participants.
A vous tout d’abord, les 1 000 délégués représentant les syndicats et sections de retraités de la CGT. Beaucoup d’entre vous vont remplir ce mandat important dans la vie de l’organisation pour la première fois, ce qui suscite, nous le savons, une certaine appréhension. Elle va vite se dissiper.
Je veux remercier nos invités qui nous ont fait l’amitié de répondre présents pour ce rendez vous. Dirigeants syndicaux français ou d’autres continents, responsables de partis politiques, d’associations, vont se succéder durant cette semaine. C’est avec plaisir que nous vous accueillons à Nantes où de nombreux camarades de Loire Atlantique, que je salue également, se sont investis pour un séjour studieux et agréable.
Le Congrès, c’est l’aboutissement d’un long processus de préparation collective qui consiste à prendre le temps de l’analyse de la situation, du bilan de l’activité, de se projeter vers l’avenir en se donnant des objectifs et en se fixant une démarche syndicale. C’est peu dire que d’évoquer un contexte économique, social et politique lourd d’enjeux pour le syndicalisme en général et singulièrement pour la CGT.

Un climat pesant s’est installé ces derniers jours dans le pays provoqué par le débat sur l’identité nationale voulu par les partis de droite dans la perspective des élections régionales.
Une majorité de français ne s’y trompe pas et juge l’initiative d’abord comme relevant d’une stratégie électorale. La polémique s’est amplifiée après la votation en Suisse rendant les minarets de ce pays plus célèbres que son chocolat ou son secret bancaire.
Reviennent sur le devant de la scène thèses et propos xénophobes. Le Front national se lèche les babines.
On ne nous enlèvera pas de l’idée qu’il y a là aussi la volonté de détourner l’attention focalisée sur la crise et ses répercussions sur d’autres terrains cultivant les clivages sur des bases nationalistes ou religieuses.
C’est dans ce contexte que, précaires parmi les précaires plusieurs milliers de travailleurs ont décidé de redresser la tête pour sortir de leur clandestinité administrative, je veux parler de la lutte des travailleurs sans papiers dont beaucoup ont choisi la CGT pour mener leur combat.
Plus de 6 000 travailleurs immigrés sont en grève, notamment en Ile de France. 2 000 entreprises sont concernées par les grèves dans 38 départements. 1 500 salariés ont adhéré à la CGT, créé leur syndicat.
Ils ne doivent pas être les otages des stratégies politiciennes.
Ils font preuve de beaucoup de courage et de lucidité. Beaucoup de monde reconnaît maintenant le caractère indigne de leur situation compte tenu de leur place dans la société française, dans son économie, dans ses entreprises. A quel titre devrions-nous accepter qu’ils travaillent, qu’ils cotisent mais qu’ils n’aient pas le droit de circuler librement ?
A quel titre, sauf à considérer que les employeurs devraient disposer d’une main d’œuvre plus docile encore parce que sous la menace de l’expulsion. Face à la mobilisation, Eric Besson a dû consentir de nouveaux textes. Les 11 syndicats et organisations qui soutiennent maintenant les travailleurs sans papiers les jugent très insuffisants.
Ils vont permettre d’autres régularisations après les 2 200 obtenues à l’automne 2008 mais trop de salariés restent sur le carreau, l’inégalité de traitement suivant les départements reste totale.
Comment prétendre dans le domaine social fixer des règles et annoncer qu’elles s’appliqueront pour un quota de 1 000 salariés seulement ?
Pour nous, ce n’est pas qu’un combat solidaire entre travailleurs français et immigrés, c’est aussi un combat pour la justice et la dignité de l’ensemble des travailleurs. _ Le premier engagement que nous pouvons prendre à ce congrès, c’est d’accroître notre solidarité et notre engagement en faveur de la régularisation des travailleurs sans papiers.

Chers Camarades, nous avons sans doute plus de responsabilités que d’autres, tout simplement parce que nous sommes la première force aux côtés des salariés, la force dont les initiatives, les prises de position comptent dans la société française.
C’est ce qui explique que nous sommes plus que d’autres l’objet de multiples commentaires.
Un Congrès de la CGT, ça laisse peu de monde indifférent. Comme vous, je lis et j’écoute ce qui se dit et s’écrit à propos de la CGT, de son congrès et des débats qui l’ont préparés.
Il y a parfois des choses surprenantes, nous avons déjà vécu cela par le passé. Bien des médias ne semblent pas parler de la même organisation que celle que nous connaissons. Certains continuent de prendre leurs désirs pour des réalités et la caricature voire le mensonge se substituent à l’analyse objective de ce que nous sommes et de notre démarche.
A défaut d’analyse plus approfondie sur la CGT, le syndicalisme, les enjeux sociaux, les commentateurs privilégient les clichés relatifs à la posture de la CGT. Nous ne nous laissons pas impressionner pour autant. Nous n’acceptons pas que cela entrave nos débats.
Nous revendiquons d’être une organisation démocratique dans laquelle des opinions contradictoires ont droit de cité. La CGT a la qualité de regrouper la plus grande diversité de militants compte tenu de leur sensibilité politique, de leur origine ou de leur conviction philosophique ou religieuse. A nous d’en faire une richesse et non un handicap insurmontable.
Le jour où les différents points de vue ne pourront plus s’exprimer dans la CGT, nous ne serons plus la CGT.
Cela étant dit, chez nous le débat n’est pas l’insulte. Des mots qui ne font pas partie du vocabulaire CGT ont été prononcés ces derniers mois. Ils ont été abondamment relayés par la presse. J’insiste sur la nécessité du respect mutuel entre militants dans la conduite de nos discussions.
Il n’y a pas d’ « ennemi de classe » dans les rangs de la CGT.
Il n’y a pas davantage d’interdit pour y prendre des responsabilités. Il y a simplement la nécessité de respecter les règles de vie communes que se sont données les syndicats pour le fonctionnement démocratique de la Confédération.

Ce ne sont pas les éditos de presse qui feront la CGT. C’est vous, les délégués du 49ème Congrès qui allez prendre les décisions pour l’avenir et élire une direction renouvelée. Nous avons d’autant plus besoin du débat entre nous que personne ne peut prétendre que notre tâche est facile.
En fait, l’une des questions centrale est de savoir si la CGT à la fin de son Congrès en sortira plus forte parce que rassemblée ou au contraire plus fragile parce que divisée.
Bien sûr, gouvernement et patronat, sans le clâmer, privilégient la deuxième hypothèse. Par contre, beaucoup de salariés veulent une CGT qui donne confiance, une CGT qui, dans ses domaines d’intervention, contribue à alimenter l’espoir dans une période où beaucoup est fait pour inciter au découragement et à la résignation.
Nous pouvons aborder tous les sujets, sans tabou, mais à condition d’être obsédés à chaque instant par l’objectif d’être plus forts à l’arrivée, c’est à dire en meilleure capacité de défendre les intérêts des salariés.
Je souhaite que chacun d’entre nous ait cette préoccupation à l’esprit durant nos travaux. Lorsque les salariés confortent la CGT dans sa première place aux élections prud’homales, lorsqu’ils sont des centaines de milliers à choisir le drapeau de la CGT pour participer aux manifestations unitaires, lorsqu’il s’adressent à nous pour obtenir un coup de main ou un conseil, ce sont des marques de confiance.
A l’ouverture de ce congrès, nous pouvons annoncer 45 905 adhésions à la CGT pour cette année. 67 % des nouveaux adhérents viennent des entreprises privées.
La grande majorité des salariés n’a pas de doute à notre égard.
Ils connaissent comme nous la situation qui conjugue crise du système capitaliste, même s’il ne la qualifie pas ainsi et la politique économique et sociale mise en oeuvre par le Président de la République qu’ils désapprouvent de plus en plus systématiquement.

Dans le baromètre annuel qui recueille l’opinion des salariés sur les syndicats, la CGT est jugée présente pour 79 %, combative pour 74 %, respectueuse de l’avis des salariés pour 65 %. Toutes les confédérations, mes chers Camarades, n’obtiennent pas de tels résultats. Dans le même temps, les salariés nous demandent d’être encore plus à leur écoute et d’inventer de nouvelles solutions pour répondre à la crise dont ils sont les victimes mais en aucun cas les responsables.
C’est dire que les salariés n’attendent pas de la CGT qu’elle renonce à être elle-même mais espèrent qu’elle saura de manière crédible porter de nouvelles ambitions dans un environnement hostile aux revendications.
Il y a juste un an, le 3 décembre 2008, la CGT était confirmée comme première organisation syndicale aux élections prud’homales. Avec 34 % des voix, notre influence a progressé de 1,34 %. Pour la première fois, la tendance historique à la baisse que nous connaissions depuis 1979 a été inversée.
La CGT progresse dans toutes les sections et dans 75 départements. Nous sommes la première organisation dans 85 départements. Les deux confédérations CFDT et FO voient leur score diminuer respectivement de 3,4 % et 2,3 %. Nous gagnons 270 élus.

Certes, il y a un bémol et il est d’importance, c’est le fort taux d’abstention. La CGT ne peut s’en satisfaire. Plusieurs facteurs y ont contribué :
- l’absence d’une campagne permettant aux syndicats d’être présents dans les médias
- un processus électoral entaché de nombreuses erreurs matérielles.
A ce propos, j’informe le Congrès que suite à notre plainte relative au système de vote électronique expérimenté à Paris, le Président de la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés vient de nous informer que suite aux opérations de contrôle qu’elle avait effectuées durant la préparation et le déroulement du scrutin, les manquements dans différents domaines ont abouti à une sanction envers le Ministère du Travail. C’est une décision importante dont nous allons analyser toutes les conséquences.

Ne banalisons pas ce très bon résultat ; nous n’en avons pas le droit et ce pour plusieurs raisons :
Déjà, il n’était pas gagné d’avance. Au contraire, beaucoup de commentateurs avisés ne s’attendaient pas à ce paysage syndical sorti des urnes.
Ensuite, parce que ce bon résultat est la conjugaison d’une réelle mobilisation de nos forces militantes et d’une démarche syndicale appréciée chez les salariés.
Aussi, je veux remercier toutes les organisations et les militants qui ont mis la main à la pâte, aux candidats à ces élections avec lesquels nous avons conduit une campagne dynamique en articulant mobilisations sur les revendications et nécessité du vote CGT. Le score de la CGT, c’est aussi un encouragement à une démarche qui conjugue contestation, mobilisation, proposition et négociation.

Une mission vient d’être confiée à un conseiller d’Etat en vue de trouver un mode de « désignation » des conseillers prud’homaux et non plus leur élection.

Surtout, n’allez pas croire que nos derniers résultats seraient pour quelque chose dans cette envie de supprimer l’élection. Un scrutin que d’aucuns présentaient comme la vraie mesure d’audience des syndicats pour apprécier leur représentativité et puis pschitt, plus rien, le résultat connu, on n’en parle plus. La CGT réaffirme aujourd’hui son attachement à l’élection des juges prud’homaux par l’ensemble des salariés. Plusieurs mesures affectent par ailleurs la prud’homie :
- la refonte de la carte judiciaire ;
- la réforme de l’indemnisation des conseillers pour leurs activités prud’homales qui impose, pour la première fois à des magistrats, un temps maximum pour le traitement des litiges ;
- on nous annonce enfin une réforme de la procédure prud’homale, mettant en cause la conciliation et l’oralité des débats.

De telles mesures touchent aux fondements de la juridiction prud’homale et auraient de très graves conséquences.
Elles s’inscrivent en outre dans un mouvement général de « mise au pas » de la justice, maintenant dénoncé par l’ensemble des organisations professionnelles de magistrats. Nous venons de lancer une campagne d’information et de signatures de pétitions, le 3 décembre, jour anniversaire du scrutin. Il revient aux organisations de la relayer en lien avec la défense quotidienne des droits des salariés.

Revenons sur l’élection de Nicolas Sarkozy à la Présidence de la république et son incidence sur les rapports sociaux. Pourfendeur du modèle social français et avocat de la rupture en 2007, son style et sa pratique des institutions ont considérablement amplifié la personnalisation et la concentration du pouvoir. En réaction à la crise, il a astucieusement remisé sa critique du modèle social, se félicitant que le rôle d’amortisseur joué par les systèmes de protection sociale ait permis de limiter la récession à un niveau inférieur à la moyenne européenne.

Au-delà des effets d’annonce lors des sommets du G20, l’objectif de transformer le système économique mondial affiché par Nicolas Sarkozy ne résiste pas à l’analyse. Il est lui-même obligé d’admettre que la spéculation repart de plus belle alors qu’il prétendait avoir obtenu une régulation efficace des marchés financiers et même la « moralisation du capitalisme ».
Son vibrant plaidoyer à Genève pour un rôle accru de l’Organisation internationale du travail et l’application de normes sociales internationales contraignantes pour les entreprises à l’échelle mondiale est en contradiction avec les réformes successives du marché du travail en France. Ces dernières visent toujours plus de flexibilité et de précarité pour les salariés et toujours moins de contraintes pour les entreprises. C’est le cas, entre autres, de la loi sur le travail du dimanche adoptée en plein été et contre l’avis de tous les syndicats.

Il n’y a pas donc de « vraie conversion » sur les normes sociales et la protection sociale de la part de celui qui a fait siffler le nom de la CGT dans ses meetings électoraux. Il ne cesse au contraire d’en dénoncer le poids sur les entreprises qu’il juge excessif dans la compétition mondiale.
La plupart des réformes engagées poursuivent bien les objectifs politiques mis en avant en 2007. Elles visent à transformer la société dans un sens favorable au patronat et aux plus hauts revenus.
La réforme des collectivités territoriales s’inscrit dans cette logique de concentration du pouvoir, à rebours de la décentralisation. La suppression de la taxe professionnelle accentue l’allégement de la contribution des entreprises au financement de la réponse aux besoins collectifs.
Son modèle tient en 3 dimensions : le transfert du risque sur les travailleurs, la socialisation des pertes des entreprises aux frais des contribuables et la privatisation des profits !
La concentration du pouvoir à l’Elysée et la prééminence des conseillers du Président sur les ministres tendent à nous présenter le dialogue comme direct et systématique avec le sommet de l’exécutif. Nous sommes conscients que cela n’est pas exempt de calculs ou de manœuvres consistant à présenter les principaux dirigeants syndicaux comme des interlocuteurs privilégiés du chef de l’Etat, quand ce n’est pas comme des serviteurs de sa politique.

J’ai pu entendre dire à ce titre que j’étais personnellement responsable de la mutation d’un préfet, du déplacement d’un ministre, de la nomination d’un PDG ou que j’étais partie prenante d’un deal pour écourter la grève déclenchée contre la réforme des régimes spéciaux de retraite.
Ces rumeurs sont savamment distillées. Elles visent à instiller le doute sur la loyauté de la direction de la CGT et sa détermination à combattre les orientations économiques et sociales actuelles.
Et puisque quelques militants me font ce procès, alors je vous le dis, je ne suis pas affecté d’un « sarkozysme » aigu, je me sens vacciné contre cela.
Rappelons-nous que Nicolas Sarkozy n’a jamais caché qu’il était un homme de rapports de force, ce qu’il applique y compris dans son propre camp politique.
Nous ne devons pas renoncer à exercer notre mandat auprès des pouvoirs publics, sous prétexte que les conditions de l’exercice du pouvoir ont changé. Se serait renvoyer la prise en compte de nos revendications à un changement du locataire de l’Elysée, alors que le rôle du syndicat est de défendre les salariés quel que soit le pouvoir en place.
Le Chef de l’Etat est le premier à savoir qu’on ne roule pas la CGT dans la farine.
Pour faire face à la politique sécuritaire du gouvernement actuel qu’il s’agisse du fichage, des réformes régressives touchant la justice, de la politique carcérale, de la chasse aux étrangers ou de la répression syndicale, la CGT est intervenue en renforçant ses liens avec les associations et les organisations professionnelles. Notamment avec la Ligue des droits de l’homme, le Syndicat des Avocats de France et le Syndicat de la Magistrature, comme dans l’action unitaire toujours en cours contre le Fichier Edwige. La défense du droit de grève et des libertés syndicales est une constante de notre activité. _ On peut citer, dans la période récente :
- l’acquittement par la Cour d’Appel de Poitiers de nos camarades de La Rochelle, accusés d’avoir incendié un local du MEDEF,
- la mise en échec de la tentative de la Ville de Châteauroux d’expulser la CGT, FO et la CFDT de la Bourse du Travail,
- la défense du droit de grève à la Régie des Transports de Marseille,
- l’action menée contre le projet de loi sur « le service minimum dans les transports terrestres » qui a limité considérablement les ambitions initiales du gouvernement. Notre action contre la discrimination syndicale s’est encore développée, débouchant sur des négociations et donnant des outils revendicatifs et juridiques qui gagneraient à être mieux connus et utilisés contre d’autres types de discrimination à l’entreprise.

Il y a à peine un an, nous étions au cœur de la crise financière la plus grave qu’ait traversée le monde depuis longtemps. Aujourd’hui, les gouvernements se veulent rassurants. « La situation est sous contrôle », clament responsables politiques, banquiers et grands argentiers réunis. La croissance repartirait progressivement en 2010. « Le noir serait derrière nous », répète à qui veut l’entendre Mme Parisot. Comme si l’économie était une affaire de météo.
Pour la majorité des salariés, des retraités, des privés d’emploi la réalité est là : le nombre de plans sociaux ne cesse d’augmenter, les salaires, les, indemnités et les pensions sont bloqués quand ils ne reculent pas, les restructurations s’amplifient, les licenciements pullulent, l’austérité budgétaire s’installe. L’Etat a les poches vides après avoir réduit l’impôt des plus riches. Alors que dans les beaux quartiers on a récemment sablé le champagne à l’annonce des magnifiques résultats financiers des banques pour 2009, l’angoisse sociale ronge toutes les couches de la société, à commencer par les ouvriers, les employés, les jeunes. C’est vrai que la situation est encore plus grave dans nombre de pays de l’Est de l’Europe. Les pays du Sud sont dans l’étau de la crise. L’Afrique quant à elle s’enfonce inexorablement. Comment dans ces conditions parler de « sortie de crise » ? Sinon parce que nos responsables ont la volonté de cacher ce qu’il faudrait changer dans le système.
La CGT refuse que les salariés soient menés une nouvelle fois en bateau. La crise est financière, évidemment. Mais elle n’est pas que financière. Dès l’automne 2007, face aux premiers soubresauts financiers, nous avons dit que la crise qui s’annonçait serait grave, profonde et sans doute mondiale. Cette crise a des racines profondes.

Depuis au moins 25 ans, pour augmenter la rentabilité du capital, on a sacrifié les services publics, privatisé à tour de bras. Les entreprises ont mis une pression sans précédent sur les travailleurs : elles ont massivement supprimé des emplois, elles se sont opposés à la hausse des salaires, elles ont dévalorisé les qualifications, développé la précarité, elles n’ont pas suffisamment investi dans la sphère productive.
Pour sa part, la mondialisation a permis la mise en concurrence des travailleurs à l’échelle du monde et a accentué les pressions sur leurs rémunérations, leurs statuts, leurs conditions de travail et d’emploi. Partout, comme l’admet aujourd’hui l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques), peu suspecte de complaisance envers nos analyses, la part des salaires dans les richesses créées, dans la valeur ajoutée a diminué et les inégalités se sont accrues. Nous avons dénoncé cette réalité, combattu les conséquences de ces choix, sans malheureusement pouvoir inverser les tendances de fond.

Cette pression permanente a conduit à une insuffisance chronique de la consommation que les patrons, les banquiers, les fonds spéculatifs ont compensée par une financiarisation accrue de l’économie aboutissant à la crise dite des « subprimes ». La dérive dans la financiarisation a été favorisée par une accumulation du capital exigeant une forte rentabilité. La Bourse est devenue la boussole pour la direction des entreprises. Des taux de rentabilité de 10, 15 voire 20 % ou plus ont été érigés en dogmes, alors que les richesses créées évoluaient beaucoup moins vite. AXA, Carrefour, BNP-Paribas, Société Générale ont ainsi pu afficher une rentabilité moyenne de leurs capitaux de respectivement 12 %, 15%, 22 % et 15 % sur la période 2003/2007. Pire, des entreprises industrielles ont atteint les mêmes sommets sur la période. 4 exemples : Bouygues (17 %), Eiffage (24 %), Renault (19 %), STMicroélectronics (15 %). De telles normes financières ont eu des conséquences directes sur la gestion des entreprises. Elles ont ajusté masse salariale et investissements productifs en fonction de la rentabilité exigée des capitaux et des marchés financiers. Le travail créateur de richesses a été méprisé. La loyauté attendue par les salariés de leur entreprise a été bafouée.
On a commencé avec les fameux « licenciements boursiers » qui aboutissent à la fermeture d’entreprises viables au prétexte qu’elles ne dégagent pas suffisamment de profits et donc de dividendes pour leurs actionnaires.
Certains découvrent aujourd’hui les répercussions dramatiques des organisations du travail et des techniques de management qui peuvent amener des salariés au suicide.
La CGT ne convoque pas au banc des accusés quelques exécutants, quelques intermédiaires. Nous ne cherchons pas des boucs émissaires. Nous mettons en cause un système. Un système où les taux de rentabilité exigés, nettement supérieurs au taux de croissance des richesses, a produit une situation intenable sur le long terme. Cette rémunération des capitaux s’est nourrie d’une amputation de l’emploi, d’une détérioration des conditions de travail, d’une mise au rebut de machines et d’une dégradation de l’environnement. Le système était condamné à des soubresauts de plus en plus importants jusqu’à cette crise exceptionnelle.

Cette crise, avec ses conséquences terribles pour les travailleurs et pour l’économie à l’échelon du monde, n’est donc pas seulement une crise de la finance. Elle est la manifestation d’une crise du système capitaliste. Elle résulte d’années de pression sur les salaires, de longues périodes de récession sociale, de mise en cause des activités industrielles et des services publics. En sortir nécessite de rompre avec les politiques anti-salariales et antisociales et particulièrement de desserrer l’étau de la finance sur l’industrie et les budgets publics.
On nous parle de « moraliser le système ». Cela ne suffira évidemment pas. Poser de nouvelles règles, « réguler », comme disent les experts, est indispensable mais pas suffisant. La crise actuelle met en exergue le besoin d’une nouvelle stratégie de développement social, économique et environnemental, ce qui suppose évidemment une relance du pouvoir d’achat mais aussi de profondes transformations économiques et sociales.
Notre message est clair. Pendant 25 ans, les choix gouvernementaux, comme ceux des entreprises, ont privilégié les intérêts des détenteurs de capitaux. Il s’agit maintenant de revaloriser le travail pour assurer un développement humain durable.
En d’autres termes, au lieu de considérer l’argent comme une fin en soi, nous voulons le mettre au service de la satisfaction des besoins humains fondamentaux : la préservation de la planète, l’alimentation, la santé, l’habitat, la culture, la communication, l’information. Répondre à ces besoins nécessite de reconsidérer le travail, sa place, son rôle, son contenu et les capacités créatives de l’homme qui s’y expriment. Nous nous battons pour une politique globale en faveur du travail.

Cette année 2009 a été marquée par de nombreuses mobilisations. Elle a permis de mettre en œuvre notre stratégie de construction du rapport de forces pour obtenir des conquêtes sociales dans un contexte inédit de crise systémique et d’unité syndicale. Un travail collectif d’impulsion important a été effectué par les organisations de la CGT. Cette unité est exceptionnelle pour une phase de crise économique et sociale.

Une plate forme commune a été adoptée le 5 janvier sur des propositions donnant notamment la priorité au maintien des emplois, à l’amélioration du pouvoir d’achat, à la réduction des inégalités dans les politiques salariales. Cette plateforme prévoit d’orienter la relance économique vers l’emploi et le pouvoir d’achat, de préserver et d’améliorer les garanties collectives. Elle a suscité l’élan pour de grandes journées de mobilisation nationale. Elle a été un point d’appui pour de nombreux conflits dans les entreprises, des branches professionnelles.

Les journées d’actions du 29 janvier, du 19 mars, et du 1er Mai avec des initiatives décentralisées au cours du mois d’avril ont connu un grand retentissement avec plusieurs millions de manifestants. Dans une première phase, une large partie de la population indignée a marqué sa colère face aux annonces indécentes des résultats des entreprises, aux salaires de grands patrons, aux parachutes dorés et aux stocks options.

Le Président de la République, le gouvernement et le patronat ont présenté quelques rustines, improvisées. Mais nous sommes loin du compte. Les initiatives décentralisées du 26 mai et la journée du 13 juin, comme les rassemblements du 7 octobre ont connu des participations moins importantes, nous ne l’avons pas caché.

Cette année est aussi marquée par des mobilisations engagées notamment en Guadeloupe, à la Martinique, à la Réunion, en Guyane et en Nouvelle Calédonie.
Les centrales syndicales de ces pays d’outre mer ont pris leurs responsabilités face à une situation économique et sociale marquée par la vie chère, le chômage, la précarité, la détérioration des services publics. La lame de fond populaire qu’elles ont déclenchée a contraint le gouvernement et le patronat à des négociations, notamment sur le pouvoir d’achat.
Ce mouvement est porteur de revendications sociales mais aussi culturelles et politiques. S’ajoutent à la contestation des politiques antisociales et du libéralisme la recherche d’une voie de dépassement de la situation vécue comme coloniale par bien des aspects.
Nous sommes en lien permanent avec les centrales syndicales avec lesquelles nous sommes liées. Nous avons témoigné notre pleine et entière solidarité à nos camarades et nous avons hier après-midi travaillé avec eux à l’occasion d’une réunion spécifique entre les principaux responsables. Ils sont présents parmi nous. Je les salue au nom du Congrès. Je profite de cette tribune pour dénoncer à nouveau le climat violent et la répression qui entoure les luttes. Les DOM n’échappent pas à la règle. L’assassinat en février dernier de Jacques BINO demeure à ce jour inexpliqué. Le Président de l’USTKE, Gérard JODARD, a été condamné, fait sans précédent, et est emprisonné du seul fait de sa qualité de dirigeant syndical. Nous demandons sa libération.

Les débats préparatoires au Congrès ont montré des différences d’appréciation sur les événements de cette année. Il est normal d’y revenir un instant.

Des camarades ont exprimé des désaccords avec la manière dont la direction confédérale a fait face à cette période soit au motif qu’ils rejettent par principe notre démarche unitaire qui est une orientation de congrès, soit qu’ils estiment que les initiatives de mobilisation qu’à impulsées l’intersyndicale, dont la CGT, étaient en dessous des possibilités d’action.
Des camarades pensent même que la direction confédérale a mis le pied sur le frein durant les mois de mai et juin ! La première chose que je voudrais dire à ce propos c’est que la direction de la Confédération n’a jamais prétendu être irréprochable.
Elle vous présente néanmoins un bilan d’activité sur 3 années tout à fait conforme aux orientations qui lui ont été fixées au Congrès de Lille. Nous nous sommes efforcés durant ces derniers mois d’être en permanence en relation étroite avec les directions des fédérations et des unions départementales pour bien apprécier les capacités de mobilisation réelles et prendre ainsi les meilleures décisions possibles. 12 réunions statutaires (CE et CCN) ont été organisées avec à chaque fois un débat et des décisions prises très majoritairement. A chaque étape essentielle, les organisations du CCN ont pu donner leur opinion.
C’est un mode de fonctionnement normal pour la direction confédérale. C’est le même qui prévaut pour décider de notre signature ou de notre non signature au bas d’un accord à l’issue d’une négociation.
Il est vrai que tout le monde n’était pas toujours dans les mêmes dispositions dans le processus de mobilisation.
Pour certains, ça n’allait pas assez vite, pour d’autres, il fallait prendre le temps de bien préparer chaque rendez-vous. Pour d’autres enfin, la priorité était l’action professionnelle et non le rendez-vous interprofessionnel.
L’une des missions de la direction confédérale c’est, avec l’ensemble des organisations, d’être capable de dégager la meilleure synthèse. Et je vous prie de croire que ce n’est pas toujours facile.
Il fallait et il faut entendre ceux qui reçoivent les lettres de licenciements, qui occupent leur entreprise, et pour eux il y a extrême urgence ; comme il faut entendre ceux qui approuvent mais ne se sentent pas en capacité d’aller jusqu’à l’arrêt de travail parce que la fin de mois est difficile ou qu’ils craignent le licenciement.
Comment mieux articuler nos décisions d’actions interprofessionnelles avec l’engagement de toutes nos organisations pour contribuer à leur réussite ? Comment conjuguer le cahier revendicatif de chaque lieu de travail avec l’ambition de convergences interprofessionnelles ? Ce sont là de vraies questions.

Ignorer dans nos débats actuels que le potentiel de mobilisation interprofessionnel est passé par des hauts et des bas au fil des semaines c’est se priver d’une analyse objective nécessaire pour l’avenir.
Il ne s’agit pas comme pour le CPE de lutter contre un projet gouvernemental bien identifié mais de se battre sur des objectifs transformateurs face à une crise de système sans précédent depuis trois-quarts de siècle. Cela nécessite une grande qualité d’activité à tous les niveaux.
Dans ces conditions, la réussite des mobilisations interprofessionnelles reposait, et reposera toujours, sur une bonne coordination de ces mobilisations au plan national et sur notre capacité dans tous les syndicats, les fédérations, les UD les UL de porter les convergences d’intérêts et la nécessité de l’action collective. C’est la contribution de tous qui assure le succès.
Aucun appel syndical à quelque niveau que ce soit s’il est incantatoire ne pourra suppléer à cette démarche.
Les initiatives nationales interprofessionnelles du premier semestre ont permis de rassembler des salariés qui répondaient à un appel pour la première fois. Elles ont donné confiance aux salariés pour des milliers de conflits dans les entreprises, les localités où l’affrontement sur les enjeux est brutal. Il a d’ailleurs été possible d’arracher des succès. Vous êtes témoins de ces combats.
Lorsque nous constatons qu’il a parfois manqué des forces de la CGT dans certains rendez-vous comme ceux du 1er Mai ou plus prés de nous le 7 octobre dernier, nous ne cherchons pas à culpabiliser telle ou telle organisation. Nous cherchons à identifier les dimensions de notre démarche que nous avons encore besoin de travailler pour accroître le rapport de forces par de meilleures capacités de coordination. Il est un fait également que la petite musique dissidente de FO nous refaisant le coup du « plus combatif que moi, tu meurs » a participé à diffuser le sentiment d’impuissance.

Lorsque nous faisons le constat qu’un grand nombre de salariés peut être à la fois extrêmement critique sur la politique aujourd’hui à l’œuvre et sceptique sur les possibilités d’inverser le cours des choses, ça ne nous conduit pas à considérer que les carottes sont cuites !
Cela doit nous inciter à travailler notre argumentation, nos propositions, et à responsabiliser chacun en luttant aussi contre la délégation de pouvoir.
Cela doit nous conduire à l’écoute des salariés pour définir avec eux les revendications prioritaires et les formes d’actions collectives dans lesquelles ils peuvent s’engager. Le syndicat, ses élus, c’est d’abord un outil au service des revendications définies avec les salariés et portées par l’action.
C’est vrai que notre démarche est exigeante. Vous êtes tous témoins que lorsque nous parvenons à la mettre en œuvre ça marche. A l’évidence la précarité, la menace du chômage la pression sur le pouvoir d’achat et sur les libertés syndicales pèsent sur les capacités de mobilisation.

Il ne s’agit donc pas de reporter les responsabilités sur le « niveau supérieur » mais de travailler en convergence dès le lieu de travail et à tous les niveaux pour imposer des négociations au patronat et au gouvernement sur les sujets qui préoccupent les salariés et d’obtenir par les luttes des avancées sociales.

On ne peut éluder, lorsqu’on débat de la stratégie et des objectifs, la situation des forces organisées de la CGT. Au titre de l’exercice 2007, première année du système CoGeTise, nous recensons 654 526 adhérents ayant réglé leur FNI, dont 116 959 retraités. Le niveau de règlements des cotisations pour les années 2008 et 2009 semble supérieur et peut laisser supposer un nombre d’adhérents qui va augmenter de quelques milliers. Les syndiqués sont répartis dans 22 000 bases où la CGT est présente. Nous chiffrons à 80 000 le nombre de syndiqués dits isolés, adhérents de la CGT sans pour autant bénéficier d’un vrai syndicat. J’en profite pour corriger l’interprétation qui a pu être faite sur la répartition des syndiqués de la CGT sur la base de statistiques communiquée vendredi :
- 53 % des syndiqués sont affiliés dans les fédérations dites du public,
- mais ce sont 56 % des syndiqués qui relèvent de contrats de travail de droit privé. L’ensemble de nos forces réunies nous permet un contact régulier avec un peu plus de 4 millions de salariés.
C’est avec cette force de frappe que nous devons raisonner.
Une force dont nous connaissons la dynamique militante de toute celles et de tous ceux qui font la CGT au quotidien et dont vous êtes les représentants. Une force qui sait, lorsqu’elle est totalement en mouvement, mobiliser des centaines de milliers de salariés au point que l’on constate, c’est vrai, que dans les mobilisations unitaires, la CGT rassemble le gros des troupes.
C‘est cette force qu’il faut développer et mieux organiser, j’y reviendrai.
Les nouvelles règles issues de la loi du 20 août 2008 sur la représentativité syndicale et la validité des accords influe sur les relations intersyndicales. En dénonçant l’arrêté de 1966 qui figeait la représentation syndicale à partir de laquelle on a pu nous imposer trop longtemps des accords minoritaires, le dernier congrès avait décidé d’agir pour de nouvelles règles plus démocratiques. Nous pouvons nous féliciter d’avoir contribué à la mise en place d’un nouveau dispositif qui permet aux salariés de déterminer par les élections professionnelles quels sont les représentants devant siéger à la table des négociations.
Il faut transformer l’essai en permettant aux salariés des PME d’avoir des représentants élus.
Plusieurs de nos homologues s’inquiètent des répercussions de ces nouvelles dispositions puisqu’elles induisent de fait plus de démocratie, plus de transparence dans les positions syndicales.
La CGT, qui a milité pour ces transformations, doit les appréhender comme un encouragement vers une démarche de consultation permanente des salariés sur le contenu des revendications et l’appréciation du résultat après une négociation.
L’évolution du droit n’est pas pour rien dans certaines stratégies de recomposition syndicale. Après le projet avorté de fusion UNSA-CGC, c’est la remise en selle d’un pole syndical, dit réformiste par opposition au syndicalisme dit contestataire. Ce schéma où il y aurait des blocs syndicaux par principe en opposition l’un à l’autre satisferait pleinement le patronat.

Lorsque la CGT réaffirme dans son document qu’elle veut contribuer, par tous les moyens possibles, à ce que les syndicats et les salariés se rassemblent pour peser plus unis et plus forts, nous sommes fidèles à notre identité et à notre histoire. 80 % des salariés approuvent l’approche unitaire des syndicats. La CGT est la première organisation aussi parce qu’elle travaille au défi de l’unité. Le virus le plus dangereux pour les salariés, cela a toujours été la division.
Alors, quand les syndicats confrontent leurs analyses, se rencontrent, ça étonne, ça surprend encore, voire ça inquiète.
Quand la CFDT invite la CGT à réfléchir sur l’avenir du syndicalisme à l’occasion de ses universités d’été, qui peut croire que nous y allons pour copier ?
C’est nous qui progressons aux élections, donc c’est nous qui sommes invités ! C’est comme ça qu’il faut voir les choses.
Pourquoi croire que c’est nous qui, par principe, serions influençables sans jamais penser que notre activité peut en influencer d’autres ?

Lorsque la FSU et la CGT ont considéré d’un commun accord qu’il était souhaitable et possible de travailler ensemble sur des enjeux de la période. Cela illustre que des coopérations intersyndicales plus poussées sont envisageables, comme en témoigne le colloque réunissant nos militants à Caen, conclu par un texte sur la refonte de la formation permanente et une formation tout au long de la vie. Le dialogue entre nos organisations se poursuivra.
La CGT doit poursuivre son investissement dans le syndicalisme international au sein de la CSI et faire progresser un syndicalisme fondé sur la mobilisation des salariés à l’échelle du monde, à l’image des actions du 7 octobre pour le travail décent. Nous devons apprécier l’élection à l’unanimité la semaine dernière de notre Camarade Joël Decaillon comme Secrétaire général adjoint de la CES comme une reconnaissance de notre apport au syndicalisme européen. Nous ferons le point de la situation dans les prochains jours avec les autres syndicats. Cela ne nous empêche pas de prendre nos propres initiatives et de nous mettre à l’offensive dès maintenant.

La crise de confiance des salariés à l’égard du patronat s’approfondit si l’on en juge par une enquête parue la semaine dernière.
59 % des salariés estiment être perdants entre ce qu’ils apportent et ce qu’ils reçoivent de leur entreprise ou de leur administration, seuls 8 % estiment être gagnants.
44 % des salariés estiment que leur situation de travail s’est dégradée. Laurence Parisot a beau nier l’évidence en affirmant que « l’idée d’un divorce salariés-entreprise est fausse », les chiffres sonnent comme un cinglant démenti.
Le résultat du match Medef / CGT est sans appel. Le Medef subit une défaite inégalée : 86 % ne font pas confiance au MEDEF. 48 % font confiance à la CGT.
Cette enquête souligne aussi le degré de souffrance des salariés.
Derrière la souffrance vécue par les salariés au travail, c’est la question du travail lui-même qui est posée. Le problème n’est pas seulement celui des conditions de travail et de son organisation.

Certes, il est indéniable que les formes d’organisation du travail à l’œuvre aujourd’hui, produisent des effets négatifs sur la santé des salariés.
Ces formes d’organisations du travail, de management, placés sous la contrainte d’objectif de rentabilité à court terme entravent les capacités des salariés, leur aspiration à réaliser un travail de qualité. Mais la souffrance au travail est plus fondamentalement le résultat d’un détournement du travail, à des fins de rentabilité et de profit, sans rapport direct avec sa vocation à être utile socialement..
Le travail devrait servir à construire sa vie, celle de sa famille et plus largement, par son efficacité économique, le développement de la société. Mais jusqu’à quel point cela est-il possible quand on prive le salarié de toute possibilité d’intervention sur le contenu et la finalité de son travail ?
La souffrance des salariés est le symptôme d’un travail malade, d’une démocratie amputée, d’une citoyenneté qui reste à la porte des entreprises et qui parait, de plus en plus, un rêve inatteignable.

Le syndicalisme, en intervenant avec les salariés, pour faire reculer les risques professionnels et améliorer les conditions de travail, conduit à se poser, avec eux, la question du contenu du travail, de sa transformation, de son sens et des droits démocratiques nécessaires à l’épanouissement humain dans l’entreprise et dans la société.
Les négociations, concertations, délibérations proposées par le Medef se multiplient. _ Mais les perspectives d’aboutir se font de plus en plus minces. Pendant ce temps, le patronat est le grand bénéficiaire des arbitrages gouvernementaux. Allègements de cotisations sociales, suppression de la taxe professionnelle, exonération de la taxe carbone, TVA à 5,5% dans la restauration, la liste des cadeaux s’allonge sans cesse. En 2 ans, 30 milliards d’euros sont tombés dans l’escarcelle des entreprises. Le Medef n’a pas besoin de donner de la voix, ses souhaits sont systématiquement exaucés.
Côté salariés, la facture est de plus en plus lourde. L’imposition des indemnités pour accident du travail atteint de ce point de vue l’indécence. Je ne sais pas s’il y aura une loi interdisant la fessée mais il y a quand même des coups de pied au cul qui se perdent ! Pour nous aider à passer à l’offensive, la Commission exécutive confédérale vous propose 3 initiatives :
- une campagne nationale sur les revendications qui engagerait l’ensemble de nos organisations, dès le début de l’année,
- notre participation dans un rendez-vous de mobilisation coordonnée en Europe,
- une action plus résolue pour la défense des services publics.

Emploi, salaires et retraites pourraient si nous le décidons ensemble, constituer les 3 thèmes d’une mobilisation revendicative de la CGT dès le premier trimestre 2010. Les défis posés par l’extension du chômage, la volonté d’imposer une baisse du pouvoir d’achat et des droits à la retraite, imposent un appel à l’action des salariés. Cette campagne revendicative serait l’occasion de donner corps à notre revendication de nouveau statut du travail salarié et de sécurité sociale professionnelle. Il s’agit pour nous de libérer le travail des contraintes actuelles qui le mutilent et qui le mettent au service exclusif de la finance.
Première question : l’emploi 30 millions, c’est le nombre d’emplois que devraient perdre les pays développés en 3 ans, selon l’OCDE.
Les destructions d’emplois ont dépassé le chiffre de 600 000 depuis un an, le nombre de chômeurs officiel s’établissant pour la catégorie A à 2,5 millions.
S’il y a moins de 3 millions de chômeurs et un pourcentage de la population active au chômage inférieur à 10 %, c’est du fait de l’exclusion des statistiques officielles des salariés en formation, en Contrats de transition professionnelle, en convention de reclassement personnalisé et ceux en dispense de recherche d’emploi. Le pire est sans doute à venir car 750 000 chômeurs vont arriver en fin de droit en 2010 et vont se retrouver au RMI faute de créations d’emploi suffisantes. Premières variables d’ajustement dans la politique de restructuration des entreprises : les précaires ont été les premiers à rejoindre les files d’attente de Pôle Emploi. Les entreprises tapent dorénavant « dans le dur », c’est-à-dire dans les CDI.

Déjà asphyxié par une fusion stupide combattue par la CGT, pôle emploi est dans l’incapacité de gérer l’afflux massif de chômeurs. Malgré les nombreuses aides accordées aux entreprises, le plan d’urgence pour l’emploi des jeunes adopté en avril par le gouvernement connaît un flop retentissant.
La CGT a dénoncé ce plan dans la mesure où il reprenait les vieilles recettes marquées du sceau de la précarité et qui ont fait maintes fois la preuve de leur échec. Nous revendiquons de conditionner les aides aux entreprises à la pérennisation des contrats en alternance, des contrats aidés, à la transformation des stages en contrats de travail à durée indéterminée.
Nous revendiquons par ailleurs une allocation d’autonomie pour les jeunes en formation initiale et un revenu d’insertion pour les primo demandeurs d’emploi.
Nous ne pouvons pas déconnecter la bataille pour l’emploi de celle que nous avons engagé sur l’industrie.

La question de l’avenir de l’industrie est revenue sur le devant de la scène. Le patronat, le gouvernement, le Président de la République cherchent à s’en approprier le mérite. Force est cependant de constater que sans l’action persévérante de la CGT, la France ne compterait sans doute plus dans le concert des grandes nations industrielles.
Les batailles des années 80 et 90 pour défendre les grandes filières industrielles, de la sidérurgie à la chimie, en passant par le textile et l’automobile, sont encore dans les mémoires. Plus récemment, il a fallu le rassemblement de Villepinte en 2004, la première manifestation nationale du 9 juin 2005 à Paris, la campagne de la CGT avec ses temps forts des Assises de l’industrie en juin dernier, pour que le gouvernement se décide à rouvrir le dossier sous la forme des Etats généraux de l’Industrie.
Mesurons ce qu’il a fallu de ténacité pour en arriver là. Cela faisait plus de 25 ans qu’un débat national sur l’avenir de l’industrie ne s’était pas tenu.

Bien sûr, ce n’est pas parce que le dossier est rouvert qu’il va déboucher. Mais mesurons que nous avons été capables de créer un rapport de force, de mobiliser à nouveau 30 000 salariés, ouvriers, techniciens, ingénieurs le 22 octobre à Paris. Il nous appartient d’imposer les priorités qui sont les nôtres, l’emploi, les qualifications, la recherche, les financements adaptés, les droits nouveaux des salariés…
En l’état, le gouvernement propose peu. A écouter Christian Estrosi, Ministre de l’Industrie, il faudrait instaurer une prime à la relocalisation d’activités et un nouveau « crédit d’impôt innovation ». Non seulement le compte n’y est pas mais nous n’irions pas dans la bonne direction. La CGT ne cautionnera pas de telles mesures, de nouveaux cadeaux aux entreprises.
Nous venons d’interpeller officiellement le Ministre de l’Industrie à ce sujet. Nous portons nos exigences et propositions dans les différentes enceintes nationales et régionales. Nous devons continuer à faire de cette question un thème de mobilisation des salariés dans les différentes filières et les territoires.

Nous devons également aborder l’emploi en lien avec la problématique du développement durable.
La crise économique et sociale actuelle comme la dégradation de l’environnement appellent de façon urgente une nouvelle logique de développement. Les syndicats ne doivent pas laisser d’autres acteurs s’emparer seuls de ce débat et en fixer les termes. Le patronat met en avant la compétitivité des entreprises.
Les ONG de défense de l’environnement se focalisent pour leur part sur les enjeux purement environnementaux sans toujours intégrer les questions sociales.
L’expérience du Grenelle de l’environnement démontre qu’en confrontant nos approches et sans renier nos conceptions fondamentales, nous avons pu construire avec les ONG des positions offensives et obtenir des avancées en matière de transport, de rénovation thermique de l’habitat ou de mise en œuvre d’une filière de déconstruction des navires. _ Ces avancées nécessitent bien sûr des batailles importantes pour que ces engagements se concrétisent, notamment en terme de financement. Ces convergences n’escamotent pas certaines approches différentes.
La CGT ne souscrit pas à la thèse de la décroissance et milite pour un rôle majeur de l’industrie pour réduire les émissions de CO2.
A ceux qui pensent que nous cédons à une mode, je rappelle que la CGT n’a pas attendu le Grenelle de l’environnement ou le sommet de Copenhague pour s’intéresser au développement durable. Dès 1999 la CGT précisait lors de son 46ème Congrès que « changements technologiques, mondialisation, besoin de préserver l’environnement … nécessitent de nouveaux choix sociaux, économiques et de gestion » et que « la prise en compte de ces 3 dimensions nouvelles de la croissance devrait conduire à adopter un mode de développement durable ».
Nos propositions en matière d’emploi doivent bien sûr intégrer la question des droits nouveaux d’intervention des salariés : représentants des salariés dans les conseils d’administration, création d’un droit suspensif aux licenciements pour permettre aux salariés d’avancer des alternatives aux suppressions d’emplois. Nous voulons intervenir tout autant sur l’emploi public mis en cause par la RGPP et la déréglementation que sur les emplois privés.

J’en viens à la seconde question pour cette campagne, celle des salaires. Nous entrons incontestablement dans une nouvelle phase de la bataille pour les salaires. Le patronat, s’abritant derrière la crise, cherche non seulement à bloquer les revalorisations indispensables, mais il cherche aussi à amputer les rémunérations complémentaires (primes, intéressement, participation). Il s’attaque désormais au niveau des salaires en tant que tel.
Précarité et pauvreté salariale tirent l’ensemble des salariés vers le bas. Après le « travailler plus pour gagner plus », on passe au « gagner moins pour garder son boulot ! » La tentation pour les patrons de rogner sur les salaires se fait de plus en plus pressante : rémunérations gelées, RTT supprimées, primes réduites …, voici un avant-goût de la cure d’austérité qui risque de frapper nombre de salariés en 2010. Une pilule amère que les entreprises tenteront de faire avaler aux salariés en invoquant la préservation de l’emploi. C’est déjà en cours.
Il n’y a pas eu de coup de pouce pour le SMIC en 2009. Au 1er janvier 2010, dans 3 semaines, le SMIC augmentera de 0,3 – 0,4 %, soit 4 à 5 euros par mois ! 3,4 millions de salariés sont rémunérés au Smic, c’est 300 000 salariés de plus. La pauvreté est liée au développement des emplois à bas salaires. Elle touchait 3,7 millions de salariés ayant un emploi en 2007.
Le RSA - en moyenne une centaine d’euros supplémentaire par ménage de travailleur pauvre - ne suffira pas pour réduire les difficultés que vivent ces familles ! C’est par l’accès à l’emploi de qualité que les travailleurs pauvres et les titulaires du RSA pourront sortir de la pauvreté.
Si cette tentation de bloquer les salaires, voire d’abaisser les rémunérations venait à se généraliser, les conséquences pour l’économie seraient évidemment dramatiques. En cas de baisse générale des salaires, c’est l’emploi qui trinquera, la baisse du pouvoir d’achat des salariés venant réduire leur consommation, accentuant la dépression de l’économie. De quoi engager notre pays et l’Europe dans la déflation. En matière salariale, au moins une fois par an, les salaires doivent faire l’objet de négociations, aussi bien dans les branches professionnelles que dans les entreprises. Il est nécessaire d’actualiser partout les cahiers revendicatifs.

Augmenter les salaires, les pensions et minima sociaux, c’est un enjeu majeur pour répondre aux besoins des salariés, retraités, privés d’emploi,… pour relancer la consommation, pour sortir de la crise. Le SMIC est un des piliers de la croissance. C’est la base de reconnaissance des qualifications, c’est un repère social en terme de niveau de vie. La CGT ne le laissera pas être vidé de son contenu.
Notre campagne doit également prendre toute la dimension de l’exigence qui grandit parmi les salariés en matière d’égalité salariale entre femmes et hommes. C’est une revendication jugée prioritaire par les salariés. Agir sur l’emploi et sur les salaires est de nature à conforter tous les systèmes de protection sociale en accroissant les ressources de la sécurité sociale.

Cela me conduit à évoquer un troisième axe : l’avenir des retraites.

L’avenir des retraites sera au cœur de l’affrontement social en 2010. Ce rendez-vous sera « le marqueur de la volonté de réforme de la majorité » a déclaré le Président de la République. Nous sommes bien décidés à en faire « le marqueur de la volonté de résistance des salariés » face à mise en cause des garanties sociales.
Je veux commencer par dénoncer l’immobilisme qui règne depuis 2003 pour reconnaître la pénibilité de certains métiers et la concrétiser par une reconnaissance d’un droit anticipé au départ à la retraite. Ceux des travailleurs ayant une espérance de vie de 7 ans inférieure aux autres parce qu’usés par le travail ont droit à la retraite anticipée. Le gouvernement conforte le patronat à s’exonérer de toute responsabilité. Nous voulons que cette question de la pénibilité soit réglée avant le rendez-vous retraite de 2010. La retraite par répartition est la traduction de la solidarité entre jeunes, actifs et retraités. _ C’est un enjeu de société. Le Président de la République reprend ses objectifs de campagne électorale de 2007. Conformément aux souhaits du Medef, il récuse toute nouvelle contribution des entreprises au financement des retraites. La CGT doit dès maintenant de se préparer à l’échéance.
Il est clair que cela suppose une forte mobilisation des salariés et l’action la plus unitaire possible.
J’attire à ce propos votre attention sur le fait que la division syndicale a régulièrement pesé sur cette question. Mesurons l’intensité de la bataille que nous devons engager pour éviter que la division se reproduise en 2010.
Quant aux objectifs revendicatifs, ce congrès est l’occasion de les repréciser.
Notre système de retraite s’est construit à partir de l’existence de plusieurs régimes, avec un principe commun, le service d’une « prestation définie », c’est-à-dire la garantie, à l’âge d’ouverture du droit, d’un niveau de retraite par rapport au niveau de salaire perçu en activité : ce qu’on appelle le taux de remplacement.
Cette garantie a constitué la base du système de retraite en France depuis la Libération. Madame Parisot, Présidente du Medef a eu cette déclaration stupéfiante à propos de l’âge de la retraite : « à 57 ans, on n’a pas le même âge suivant que l’on a encore 3 ou 6 ans à faire dans l’entreprise », autrement dit, plus vous travaillez longtemps, plus vous restez jeunes ! A ma connaissance, aucun professeur de médecine n’avait encore fait cette découverte !
On voit clairement se dessiner la volonté à la fois de reculer l’âge ouvrant droit au départ à la retraite et la volonté de modifier le système en profondeur. A l’inverse, la CGT réaffirme ses revendications : 75 % minimum de taux de remplacement et maintien du droit au départ à 60 ans, avec un minimum de pension aligné sur le SMIC. C’est le socle commun qu’elle propose pour tous les régimes et que nous avions défini au Congrès de Montpellier et précisé à celui de Lille. La solidité d’un régime par répartition repose sur la confiance qu’ont les actifs cotisants, particulièrement les plus jeunes d’entre eux, dans le niveau de la pension qu’ils percevront à leur tour.
Ce niveau est aujourd’hui remis en cause par les conséquences des réformes Balladur et Fillon. Le gouvernement et le Medef veulent aller plus loin.
Pour enrayer cette mécanique infernale, nous devons faire partager massivement notre objectif revendicatif de conforter l’ensemble des régimes par l’existence d’un socle commun, avec une réforme des financements permettant de garantir l’avenir pour chacun des régimes.

Prêtons attention à la volonté du Medef et de l’UMP de mettre en place une réforme générale - dite « systémique » - consistant à fusionner tous les régimes actuels en un seul, régime prétendument miracle pouvant prendre la forme d’un mécanisme par points. Elle signifierait la remise en cause de la retraite à 60 ans et le durcissement des conditions d’acquisition des droits.
La baisse des pensions ou l’écroulement du système sont présentées comme les 2 seules alternatives possibles !
Face à cette offensive, la CGT ne veut pas laisser chaque régime se battre isolément ce qui ferait le jeu de ceux qui veulent imposer une régression historique en matière de retraite.
Avec la proposition faite au Congrès de débattre d’une « maison commune des régimes de retraite », tout à l’opposé d’une mise en cause des régimes actuels, nous visons à créer les conditions d’une gestion transparente des régimes, afin d’assurer, pour les nouvelles générations, la sécurité du financement et la transparence. Nous en débattrons. Croyons bien que nous jouerons l’année prochaine une partie décisive qui implique l’engagement solidaire de toutes les forces de la CGT et du syndicalisme.

Deuxième initiative, l’ensemble des Confédérations syndicales réunies dans



08/12/2009
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